L'Agence Nationale du Sport : qui finance et qui gouverne ?

L'Agence Nationale du Sport : qui finance et qui gouverne ?

Jeudi 3 décembre dernier, la Sports Management School, en collaboration avec BeSports, a organisé un webinar sur la gouvernance du sport. La qualité des intervenants et la teneur des débats a empêché de répondre aux questions posées par les très nombreux spectateurs. Nous tentons d'y répondre ici.

Lien vers le replay du webinar : https://www.besport.com/event/6117579

Comment est financée l'agence nationale du sport et comment contribue-t-elle au développement du sport en France ?

L’Agence Nationale du Sport (ANS), créée en 2018 en lieu et place du Centre de Développement National du Sport (CNDS), a pour ambition de révolutionner et réorganiser la gouvernance et la gestion du sport en France, à la fois du sport d’élite et de haut-niveau et du sport du quotidien, du sport amateur.  

Son budget, en 2019, a été fixé à 284 millions d’euros correspondant d'une part à une subvention de 137,6 millions d'euros en provenance du programme 219, initialement dévolu en 2018 à la mission « Sport, Jeunesse et Vie Associative », et d'autre part à 146,4 millions d'euros issus du produit des taxes précédemment affectées au CNDS. 

Ces taxes regroupent à la fois la taxe Buffet sur les droits de retransmissions sportifs, de 40 millions d’euros en 2019, et normalement déplafonnée dès 2020 à 74 millions d’euros, la taxe sur les jeux hors paris sportifs, d’un montant de 72 millions d’euros, et la taxe sur les paris sportifs, de 34,4 millions d’euros. 

En détail, 33% du budget consacré au soutien et au développement du sport est dévolu à la pratique du quotidien, à la promotion du sport pour le plus grand nombre, via des subventions aux collectivités locales et territoriales et aux clubs de sport. Le reste, 67% revient au sport d’élite et aux sportifs de haut-niveau, à travers des reversement par convention aux fédérations, des bourses spécifiques et des aides personnalisées. Cet écart rejoint la philosophie même de l’agence, d’inspiration anglo-saxonne, où l’objectif prioritaire est, outre-Manche, d’abord et surtout la performance et la réussite des athlètes nationaux sur les compétitions internationales. 

Comment est représentée la gouvernance de l'Agence Nationale du Sport ?

Lors de sa création, en 2018, et sa préfiguration, en février 2019, il a été acté que l'Agence Nationale du Sport serait structurée autour d'une gouvernance partagée entre l'Etat, les collectivités, le mouvement sportif (les fédérations et les clubs) et, la grande nouveauté, les acteurs du monde économique. 

Alors qu'initialement, le Centre National de Développement du Sport était organisé seulement en accord et en concertation avec l'Etat, où, selon les mots de Thomas Remoleur, directeur associé d'Olbia Conseil, il n'avait que « très peu de pouvoir », l'ANS revoit son modèle de gouvernance et impose un principe démocratique entre tous les acteurs sensibilisés aux questions sportives. 

Comme une assemblée constituante, chaque acteur détient un certain poids dans la prise de décision. En détail, l'Etat, les collectivités et le mouvement sportif pèsent chacun 30% des voix. A cela, se rajoute le monde économique, avec 10% des votes.  

Avec cette répartition, "aucun acteur ne prédomine", comme l'annonce Patrick Bayeux, coauteur du rapport sur la réforme de la gouvernance du sport. Alors que, rappelez-vous, à l’époque du CNDS, l'Etat était tout puissant sur les décisions sportives

Hors les traditionnelles subventions et taxes affectées, avez-vous des éléments d'information sur la contribution du privé ?

Alors que, dorénavant, le monde économique, avec 10% des votes au sein de l’Assemblée, est présent à l’Agence Nationale du Sport et peut faire porter sa voix, le budget de l’ANS n’intègre pas une ligne de financement privée. Pour l’instant, tout dépend des subventions publiques et des taxes affectées, à hauteur de 280 millions d’euros et 320 millions dès 2020, avec le déplafonnement prévu de la taxe Buffet. 

C’est pourtant un élément d’inquiétude à prendre en considération. Trop passer par l’Etat et le financement public, voire par des taxes affectées dépendantes aux aléas économiques pourrait conduire à des déséquilibres à l’avenir. En effet, l’Etat, étant dépositaire à 47% du fonctionnement, en fonction du choix de politique, de la personnalité du locataire à l’Elysée, pourrait parfaitement acter une baisse de dotation préjudiciable à la stabilité du financement du sport. Ce secteur a pendant trop longtemps été considéré comme une variable d’ajustement à la baisse en cas de ralentissement de l’activité. 

De même, concernant les taxes affectées, elles sont elles-mêmes dépendantes de la conjoncture et, avec l’actuel épisode Médiapro, une diminution des droits TV pourrait provoquer une baisse de l’assiette consacrée au financement du sport. 

Il faut donc trouver des alternatives et soutenir une partie financée, conjointement avec le public, par le privé. C’est d’ailleurs le vœu du Cosmos, le conseil social du mouvement sportif, qui, au printemps dernier, avait présenté un projet de plan de relance du sport, favorisant le financement à travers le mécénat sportif, le sponsoring sportif et des crédits d’impôts associées aux investissements privés d’aide et de soutien aux associations sportives. L’idée serait de passer par des déductions fiscales et des dispositifs spécifiques afin d’inciter les acteurs du privé à prendre de plus en plus partis en faveur du sport.

Pierre Rondeau

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