Coupe du Monde 2019 : La France n'est plus une grande nation de rugby

Coupe du Monde 2019 : La France n'est plus une grande nation de rugby

Michael Tapiro

Défait de la Coupe du Monde de Rugby 2019 d’un petit point en quart de finale, après avoir mené sur l’ensemble de la rencontre, le XV de France sera une fois encore absent du dernier carré sur la scène mondiale. Réduits à 14 après un geste malheureux de Sébastien Vahaamahina à la 48ième, les joueurs tricolores sont une fois de plus passés tout proche d’un succès mais malheureusement ces désillusions constantes cachent en vérité un mal bien plus profond.

Un mental défaillant à toute épreuve

L’équipe de France est talentueuse. C’est un fait avéré tant il y a peu à redire sur le niveau des joueurs individuellement. Que ce soit sur le plan sportif, physique ou tactique, le XV de France possède sa carte à jouer parmi les meilleures bien que certaines nations soient encore mieux armées. 

Les travers de cette équipe se cachent davantage sur l’aspect psychologique. Le véritable point faible du XV de France, c’est son mental. Un mal qui poursuit cette équipe depuis plusieurs années maintenant malgré les changements de composition et de sélectionneurs. Et pour cause, comme j’ai eu l’occasion de le dire maintes fois, c’est l’ensemble du rugby français qui s’est construit dernièrement sur des fausses croyances en pensant d’une part que nous avions le meilleur championnat du monde et d’autre part que le fameux French Flair ferait la différence. Nous nous sommes vu trop beaux pendant que les autres nations travaillaient et nous payons aujourd’hui les pots cassés. 

Travailler sur l’aspect psychologique, les All Blacks l’ont déjà fait avec brio après leur déroute en 2007 justement contre la France. C’est toute une gouvernance qui s’est remise en question afin de comprendre pourquoi la meilleure équipe du monde, n’arrivait pas à décrocher le titre mondial. Ils se sont posé les vraies questions afin d’amener les réponses qui leur ont permis aujourd’hui d’être double champion en titre. Pendant ce temps, nous en France, avons préféré investir des centaines de milliers d’euros pour construire un joug électronique avec l’aérospatial afin d’être plus performant en mêlée avec les résultats que l’on connaît. La Nouvelle-Zélande a notamment beaucoup travaillé sur ce qu’on appelle la « Legacy », soit l’héritage qui permet à l’équipe nationale de sans cesse se renouveler tout en conservant ce même état d’esprit qui fait la différence dans les grands matchs. Il s’agit alors de composer un collectif capable de performer à l’instant « T ». C’est le même travail qu’a effectué Aimé Jacquet en 1998 lors de sa composition de l’équipe de France où il écarte volontairement Papin, Cantona et Ginola. Le sélectionneur a souhaité garder le contrôle de son équipe et de ses hommes quitte à faire l’impasse sur ces talents puisqu’il a estimé que ces derniers pourraient nuire au collectif. Il choisit alors ses joueurs non pas uniquement sur leurs compétences mais sur l’absolue nécessité que la somme de leurs individualités doit permettre au groupe d’atteindre l’objectif fixé. 

Sans jeter la pierre sur le sélectionneur ou un joueur en particulier, l’analyse des dernières minutes de la rencontre face au Pays de Galles lors du Tournoi des Six Nations montre des fautes majeures de rugby qui ne sont pas que des simples faits de jeu. Ces fautes notamment sur l’interception Galloise qui nous coûte la victoire sont des signaux pour un sélectionneur qui indiquent la qualité psychologique du joueur. Un entraîneur doit tenir compte de ces signaux en composant son groupe pour le mondial afin de comprendre si le sportif sera bel et bien capable de surmonter la pression ? Est-ce qu’en dépit de ses qualités, il saura se sublimer dans l’adversité ? Le geste de Vahaamahina est une conséquence de cette défaillance mentale qu’accuse la France depuis près de deux ans maintenant. Encore une fois, l’idée n’étant pas de blâmer sa personne mais bien de comprendre ce qui l’a amené à commettre ce geste à ce moment précis. 

Non, le XV de France ne méritait pas d’accéder aux demi-finales

Au vu du score et des faits de jeu, nombreux sont ceux qui estiment que le XV de France aurait mérité un autre dénouement alors que les demi-finales leurs tendaient les bras tout au long de la rencontre. 

De mon côté, je pense qu’il est urgent de cesser de se rassurer à coup de « On n’était pas loin ! » 

Et pour cause ! Le rugby est un sport de précision, complexe et qui se joue physiquement et mentalement sur 80 minutes + les arrêts de jeu. Les Gallois savaient exactement ce qu’ils avaient à faire et jouaient avec beaucoup de confiance. Leur coach était préoccupé mais pas inquiet, il savait pertinemment qu’il y aurait un trou côté français entre la 70ième et la 80ième minute car c’est toujours ainsi. Et surtout, il savait qu’à l’inverse son équipe n’aurait pas ce trou. C’est une donnée importante. En France, nous pensons toujours être champions du monde dès la mi-temps. Ce syndrome est beaucoup trop fréquent pour qu’on le considère comme une simple gêne isolée. 

Bien-sûr, il est important de rester optimiste à l’horizon 2023 et de souhaiter que cette équipe qui perd tout le temps malgré ses qualités, arrive à gommer ses problèmes psychologiques. Mais pendant ce temps, nos adversaires auront capitalisé sur la confiance acquise au fil des ans en cultivant l’art de la victoire sur des matchs capitaux. Il fut un temps où nous savions gagner ces rencontres difficiles, où on ne tremblait pas devant l’adversité mais force est de reconnaître qu’aujourd’hui le XV de France n’effraie plus personne. 

MICHAEL TAPIRO

Michael Tapiro
Michael Tapiro
Président du conseil stratégique international

Entrepreneur et sportif dans l’âme, Michael a commencé avec un parcours sportif et ai fondé le Club de Neuilly sur Seine : « Rugby Club Paris Neuilly » pour ensuite créer en 1999 l’agence Au-delà du sport avec Christophe Juillet et Marc Lièvremont, spécialisée dans la relation sport et management en entreprise.
En parallèle, il a été professeur en marketing depuis 15 ans.

Pendant toutes ces années, cet entrepreneur dans l’âme souhaitait lancer sa propre école. C’est ce parcours qui l’a conduit à créer Sports Management School (SMS), une école de commerce spécialisée dans le Sport Business. SMS couvre une large variété de secteurs d’activité tels que le management du sport,  l’optimisation des structures sportives, le développement des nouveaux médias, le e-sport, les paris sportifs…

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